Ces quatre dernières années, l’ouvrage qui m’a le plus marqué s’intitule : « L’empreinte » : récit écrit par Alex Marzano-Lesnevich.
Résumé de l’éditeur (Sonatine Éditions pour la traduction française, 2019) : « Étudiante en droit à Harvard, Alex Marzano-Lesnevich est une farouche opposante à la peine de mort. Jusqu’au jour où son chemin croise celui d’un tueur emprisonné en Louisiane, Ricky Langley, dont la confession ébranle toutes ses convictions. Pour elle, cela ne fait aucun doute : cet homme doit être exécuté. Bouleversée par cette réaction viscérale, Alex ne va pas tarder à prendre conscience de son origine en découvrant un lien entre son passé, un secret de famille et cette terrible affaire. Elle n’aura alors qu’une obsession : enquêter sur les raisons profondes qui ont conduit Langley à commettre ce crime épouvantable ».
A travers des recherches minutieuses, Alex Marzano nous embarque dans un entremêlement de fresues familiales : celle d’un pédocriminel et la sienne, victime d’inceste par son grand-père maternel. En découvrant les aveux filmés de Ricky Langley, Alex veut sa mort. Pourtant, cela va contre ses convictions profondes. Elle ne peut en rester là : elle veut comprendre comment un homme en arrive à violer des enfants.
« L’empreinte » sort du lot, par rapport, aux livres contemporains manichéistes où s’opposent « le bien » et « le mal ». Alex Marzano réalise l’inimaginable : elle parvient à rentrer en empathie avec un pédocriminel et même … avec son grand-père. Elle ne pardonne pas : cela n’est pas aussi simple que cela. Elle acte qu’un trajet humain est complexe et que la vérité ne se trouve jamais dans une perspective isolée.
« Ce qui m’a tant séduite dans le droit il y a si longtemps, c’était qu’en composant une histoire, en élaborant à partir des événements un récit structuré, il trouve un commencement, et donc une cause. Mais ce que je ne comprenais pas à l’époque, c’est que le droit ne trouve pas davantage le commencement qu’il ne trouve la réalité. Il crée une histoire. Cette histoire a un commencement. Cette histoire simplifie les choses, et cette simplification, nous l’appelons vérité ».
La lecture du récit est difficile car on se sent mal à l’aise : on a presque envie de plaindre Ricky tout autant qu’Alex. Il est magistral que l’autrice soit parvenue à chercher à comprendre des actes criminels qui ont des impacts effroyables sur toute une vie et en l’occurrence, sur la sienne.
On ne sort pas de cette lecture indemne : elle nous hante très longtemps. Et nous questionne sur les secrets de famille, sur la maladie mentale, sur les limites du droit mais aussi sur la difficulté à trouver un apaisement après des viols à répétition mineure.
Aurore Van Opstal
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